Soutenu par l’ONU, le gouvernement de Fayez el-Sarraj a été refusé par le Parlement. Le trop-plein d’institutions rivales conduit à nouveau à l’absence de gouvernement.
L’ex-Premier ministre Fayez el-Sarraj, le 8 janvier dernier.
Après deux années de palabres, de réunions, de mini-sommets, de deux pas en arrière un en avant, la légendaire patience de l’ONU se voyait récompensée par l’annonce d’un gouvernement d’union nationale libyen. Sa composition avait été dévoilée par Fayez el-Sarraj, son Premier ministre. Les deux Parlements ennemis qui se disputaient la Libye depuis 2014, celui de Tripoli et celui de Tobrouk, devaient l’approuver par vote dans un délai n’excédant pas dix jours. Pour l’instant basé à Tunis, il devait s’installer à Tripoli, fief de « Fajr Libya » de l’ancien djihadiste Abdelhakim Belhadj. Ce qui n’avait rien d’évident dans un contexte libyen qui doit transiger avec milices, tribus, provinces (le pays est divisé entre la Tripolitaine, la Cyrénaïque et le Fezzan). Sans domiciliation libyenne ni soutien populaire, ce gouvernement était le troisième que connaissait le pays de l’ex-dictateur Kadhafi. Les 31 ministres qui le composaient se voulaient une mosaïque des sensibilités, clans et tribus qui se partagent le pays.
Un camouflet pour l’ONU
Cinq jours après sa nomination, el-Sarraj a essuyé un refus sans appel. Le Parlement de Tobrouk, reconnu par la communauté internationale, l’a aujourd’hui rejeté. El-Sarraj a alors annoncé à 16 h 19 sur son compte Twitter, créé le 17 janvier, sa démission, puis celle de son gouvernement à 16 h 23. L’homme n’a tweeté qu’à trois reprises. Pour sa création, puis pour les annonces de ce jour. Sévère camouflet pour l’ONU. L’ONU qui avait négocié, bataillé, palabré, multiplié le bilatéral, le trilatéral, le G+5 et autres formules afin de convaincre les Parlements de Tripoli et de Tobrouk d’adouber ce gouvernement d’union nationale. Des efforts qui reprendront. Plus tard. Mais l’intransigeance de ceux qui tentent de se partager le pays tout en s’affrontant par milices interposées a plusieurs conséquences. Daech se nourrit de ce chaos. Il prospère sur les décombres. Et grandit de jour en jour. Il n’est pas le seul groupe djihadiste à être présent en Libye.
Rumeurs de jets dans le ciel libyen
Dans les milieux diplomatiques, ils n’étaient pas nombreux dans la région à croire à la réussite de cette union. Son acte de décès statufie la situation politique. Plusieurs « diplo » estiment désormais inévitable l’intervention internationale sur Daech, dont la place forte est Syrte et ses environs. L’Angleterre, l’Italie, la France et les États-Unis seraient les quatre cavaliers d’une coalition temporaire. Aérienne, elle le sera. Terrestre, difficile à prévoir. La Libye a des frontières avec six pays. Toute intervention aurait des conséquences imprévisibles. Lucide, Martin Kobler, le haut responsable nommé par Ban Ki-moon le 4 novembre dernier, avait également retweeté le 24 janvier un proverbe libyen : « Too many captains will sink the ship. » (1).
(1) « Trop de capitaines vont gouverner le navire. »