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la Libye

Deux cents Marocains ont tenté ce week-end de passer la frontière pour se rendre en Libye. Allaient-ils rejoindre les rangs de l’État islamique ?

Les autorités algériennes sur le pied de guerre face à l’accroissement « inhabituel » de ressortissants marocains en transit en Algérie pour rallier la Libye voisine.

Quelle était leur destination finale ? C’est la question que se posent Alger et Rabat après cet afflux inhabituel de Marocains à l’aéroport Houari-Boumediène. En tout cas, les autorités algériennes ont pris contact avec l’ambassadeur du Maroc pour l’informer que pas moins de 270 ressortissants marocains ont été empêchés de se rendre en Libye via Alger. Tous venaient de Casablanca et avaient la même destination : la Libye.

Les craintes d’Alger sont-elles justifiées ?

Le quotidien algérien L’Expression rapporte que le « seul fait que tous cesvoyageurs aient pris l’avion à Casablanca a de quoi attirer les soupçons des services algériens de sécurité. » En effet, c’est par milliers que des ressortissants marocains ont tenté de rejoindre la Libye en traversant l’Algérie, rien que ces dernières semaines. Les services secrets algériens ont ainsi alerté les autorités sur le phénomène. Conséquence : l’ambassadeur du Maroc a été contacté par le ministre des Affaires maghrébines, de l’Union africaine et de la Ligue arabe, Abdelkader Messahel.

Des mesures adaptées à la situation

Parallèlement, les autorités de sécurité algériennes ont donc décidé « à titre exceptionnel » de permettre « le transit des ressortissants marocains actuellement à Alger et détenant des documents de séjour ou de travail en Libye » vers ce pays, via l’Algérie. Précision de taille : « Les voyageurs ne disposant pas de justificatifs motivant leur déplacement en Libye feront, quant à eux, l’objet d’un rapatriement vers leur pays d’origine », indique-t-on du côté des autorités. Dorénavant, l’Algérie n’autorisera aucun Marocain à franchir la frontière libyenne à partir de son territoire. Le pays va désormais pratiquer les reconduites à la frontière… « tout en mettant à disposition un moyen de transport pour assurer le retour au Maroc de ces ressortissants qui ont bénéficié d’un traitement conforme aux valeurs d’hospitalité du peuple algérien », précisent les autorités. Une réaction ferme et rapide de l’Algérie qui en dit long sur les craintes de voir grossir les effectifs de Daech par un transit à travers son territoire. 

Face aux Marocains tentés par Daech, les autorités vigilantes

En tout cas, au Maroc, les risques sont pris très au sérieux. Le directeur du Bureau central d’investigations judiciaires (BCIJ), Abdelhak El Khayam, a ainsi révélé dans une interview au journal français Le Figaro que le nombre de Marocains qui sont partis en Syrie pour rejoindre Daech s’élève à 1500, notant qu’ils « sont, pour nous, tous des terroristes et font l’objet de mesures de recherche et d’interception s’ils retournent au Maroc ». Ce chiffre en fait la troisième source de recrues de Daech après la Tunisie, 6 000 recrues, et l’Arabie saoudite, 2 700. Preuve de la vigilance des autorités marocaines : plusieurs cellules liées à la nébuleuse ont été démantelées. La dernière opération remonte au 17 janvier dernier contre une cellule de huit personnes comprenant d’anciens détenus. Pour rappel, la loi antiterroriste marocaine punit de 5 à 10 ans de prison les actes ou les tentatives de ralliement d’un foyer de tension où sévissent des organisations terroristes. Du coup, le Maroc a déployé une stratégie dite « de l’anticipation », avec notamment le renforcement de la loi antiterroriste et la mise en place en mars 2015 du BCIJ, qui constitue une interface judiciaire de la Direction générale de surveillance du territoire (DGST).

Vers une coopération sous-régionale ?

Mais ces derniers mois, tout laisse penser que les forces du groupe terroriste État islamique se sont déplacées de la Syrie vers la Libye, où une intervention militaire serait une sérieuse option pour la communauté internationale. De quoi comprendre ce constat du New York Times selon lequel les États-Unis et ses alliés ont intensifié ces derniers jours les opérations d’observation des positions de Daech en Libye. Les craintes d’Alger et de Rabat sont par ailleurs justifiées par le fait que ces transitaires pourraient être des membres de cellules dormantes en mouvement pour préparer les combats. D’ailleurs, le communiqué du ministère des Affaires maghrébines ajoute : « Le contexte sécuritaire actuel particulièrement sensible impose la plus grande vigilance et exige le renforcement de la coopération entre les pays de la sous-région. » Dès lundi, le président, aujourd’hui démissionnaire, du Conseil de la présidence du gouvernement d’union en Libye, Fayez al-Serraj, était en visite de travail en Algérie. Objectif : évoquer les défis liés à la lutte contre le terrorisme et le rétablissement de la paix et de la sécurité. Avec le vide crée par le rejet du gouvernement d’union nationale en Libye, la tâche se complique pour tout le monde, en l’occurrence autant pour le Maroc que pour l’Algérie.

 

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