Combattant rebelle posté devant une raffinerie, près de Ras Lanouf dans le nord-est de la Libye, le 5 mars 2011. © Hussein Malla/AP/SIPA

 

En visite à Tunis, le président français a reconnu la responsabilité française dans le chaos libyen d’aujourd’hui. Mais, quelques mois après être parvenu à réunir le maréchal Khalifa Haftar et Fayez al-Sarraj, la stratégie diplomatique française peine à faire sentir ses effets.

« Nous avons collectivement plongé la Libye dans l’anomie, sans pouvoir régler la situation », a reconnu le président français, le 1er février, devant le Parlement tunisien. Une condamnation franche de l’action de Nicolas Sarkozy, à l’origine des opérations militaires occidentales contre le régime de Kadhafi. « Gaullo-mitterrandiste » proclamé, Emmanuel Macron a même tenté de se poser en grand médiateur de la crise, en tandem avec son ancien professeur de Sciences-Po, l’envoyé spécial de l’ONU pour la Libye Ghassan Salamé.

Deux mois après son élection, le 25 juillet 2017, il avait réussi le tour de force de réunir près de Paris les deux protagonistes du conflit, le maréchal Khalifa Haftar, maître de l’Est, et Fayez al-Sarraj, Premier ministre reconnu par la communauté internationale du gouvernement de Tripoli. Et d’obtenir d’eux une déclaration commune inédite.

Des accords de réconciliation caduques
La France de François Hollande avait développé une stratégie ambiguë, sa diplomatie soutenant la légitimité de Sarraj quand sa Défense aidait secrètement Haftar. L’élection de Macron et le passage de Jean-Yves Le Drian de la Défense aux Affaires étrangères ont d’abord profité à Haftar, vu comme un rempart contre le chaos milicien et l’islamisme.

« Avec Macron, les choses sont plus claires, sa position est importante pour faire évoluer le processus politique », se permettait d’affirmer le maréchal de l’Est à JA le 16 décembre 2017.

Mais en déclarant le lendemain la caducité des accords de réconciliation de 2015 à Skhirat, il fâchait son meilleur allié occidental. Le 21 décembre, Le Drian débarquait dans le quartier général de Haftar pour une explication musclée après avoir souligné sa « convergence totale » avec Sarraj, également rencontré.

Rencontre secrète entre Sarraj et Le Drian
L’aventurisme de Haftar risquant de compromettre le plan de l’ONU, qui est soutenu par la France, Salamé a réussi à convaincre Paris de se rapprocher des autorités de Tripoli. Le 31 janvier, la rencontre secrète à Tunis entre Sarraj et Le Drian, qui accompagnait son président en visite officielle, a trahi ce rééquilibrage vers l’ouest. Une présence diplomatique française permanente est désormais assurée par le roulement hebdomadaire, depuis Tunis, de l’ambassadrice (réputée favorable à Sarraj), de l’attaché de défense et de l’attaché de sécurité intérieure.

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